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ACS-Paris: la parole est aux professeurs (IV)

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Alors que la prestigieuse Parsons School de New York vient d’ouvrir ses portes à Paris, la capitale compte plus que jamais d’écoles de mode. L’occasion de donner la parole à leurs professeurs qui sont pour la plupart des designers et professionnels

ayant une véritable activité au cœur de l’industrie de la mode. Cinq portraits originaux pour cinq établissements !

Après Esmod Paris,
Mod’Art International et l’Ecole de la Chambre Syndicale de la Couture Parisienne, FashionUnited s’arrête cette semaine à l’Atelier Chardon Savard. Créé en 1988, celui-ci met en avant la transversalité de son enseignement et propose aux côtés des métiers spécifiques de la mode d’autres ouvertures comme la chaussure ou la communication de mode. La parole est donnée à Emmanuelle Donnard qui, en parallèle de ses cours, travaille en freelance et a lancé il y a quelques mois sa propre marque de maroquinerie de luxe : Odmé.

FashionUnited : Comment êtes-vous arrivée à l’enseignement et quelle est votre fonction au sein de l’Atelier Chardon Savard ?
En fait, je suis une ancienne de l’Atelier qui suis restée proche de la direction (Dominique Savard et Cyrille Chardon). Comme j’ai toujours été intéressée par la notion de transmission, dans les deux sens, et par l’envie de créer du lien, cela s’est fait comme ça. Aujourd’hui, j’enseigne le Style aux 3e années, soit deux classes. Cela m’occupe 16 heures par semaine et me permets de développer en parallèle une activité personnelle.

Valorisez-vous davantage le Style que la Technique dans l’enseignement de la mode ?
Disons qu’arrivés en 3e année, les étudiants ont déjà acquis la technique. Pour moi, elle n’est pas forcément la plus importante. La technique est au service de la créativité, elle s’enseigne, elle s’apprend. Chaque étudiant doit aller chercher son potentiel, le développer, le mettre en valeur. Ce qui m’intéresse c’est de pousser les recherches avec eux. Cela implique du moulage sur Stockman mais aussi de la DAO (dessin assisté sur ordinateur). Il me semble important de valoriser tous les outils existants pour que les étudiants trouvent le leur. En outre, à L’Atelier Chardon Savard il y a une vraie pédagogie qui vise à développer la partie droite du cerveau dédiée au sens l’observation. Avoir du talent c’est bien mais cela ne suffit pas. Il faut travailler !

Est-ce important d’être en lien avec l’industrie de la mode quand on enseigne ?
Pour moi, ça l’est et j’aime faire ce lien. Mais je ne me considère pas comme une maîtresse : je suis une professionnelle confirmée qui s’adresse à des professionnels en formation. La notion de hiérarchie est différente. Au quotidien, cela me permet en tant que freelance de rester en lien avec la créativité car je ne retombe jamais deux fois sur le même contrat. Je peux faire du prêt-à-porter haut de gamme pendant quelques mois, puis développer des imprimés pour une saison et enchainer sur la création d’un prototype de chaussure… Pour mes étudiants cela me permet de garder en mémoire le fait qu’il ne faut pas s’éloigner d’un vrai but qui est de vendre un produit. Certains partent dans des recherches très intéressantes mais s’éloignent trop des éléments marketing à prendre en compte. Il faut toujours penser à sa cible, au segment de marché final.

Les écoles de mode prennent-elle toujours en compte l’évolution de l’industrie de la mode ?
A l’Atelier dans tous les cas, on fait tout pour que les cursus s’adaptent à l’évolution du marché. Ainsi, depuis 2011, il y a eu la création et le développement de la section communication de mode. On y parle image, shooting photo, on y enseigne les métiers de la presse, de la communication. De même que chaque année, les cours de stylisme, dessin et modélisme sont refondus. Nous essayons d’être en lien avec l’actualité comme avec ce concours pour lequel les étudiants ont planché sur une collection écolo. Enfin, nous revenons de Singapour où six étudiants jeunes diplômés ont été invités à défiler durant la fashion week. D’ailleurs nous allons mettre en place avec des partenaires des formations courtes pour booster la créativité. Le voyage à Singapour avait aussi pour but d’enclencher cela. Bref, l’ouverture sur le monde professionnel nous semble très important. Il nous importe de mettre les étudiants en situation de « vraie vie ».

Que pensez-vous des écoles de mode aujourd’hui ?
Il est évident que toutes ne se valent pas et que parfois, celles reconnues à l’international ne le sont pas pour les bonnes raisons. Pour un futur diplômé il faut qu’il prenne en compte l’image d’une école, sa philosophie (commerciale, familiale) pour être en phase avec sa formation. Par exemple, contrairement à la Belgique où les écoles ont une note commune, en France nous avons des niches différentes, il n’y a pas de vrai courant parisien. Cependant, nous avons des atouts, un très bon niveau à la fois sur la création et la technique. Il ne nous manque plus qu’un peu plus de soutien de la part des autorités. Nous savons faire émerger des talents mais de là à les promouvoir…

Céline Vautard

Photos : Portrait d’Emmanuelle Donnard
Panorama avec les étudiants en cours de style ©Hélène Vedrenne
Etudiants autour d'un modèle ©Jacky Macé